Zone de Texte:  06/05/1488   Banquet de noces du seigneur  Triuulce à Milan

HERMOLAUS Barbarus
enuoie salut à
Pierre Cara iureconsulte
& facondissime Orateur

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Translatée
de
Latin en François par maistre
Michel Nostradamus

LE seigneur Triuulce uaillant
home en fait de guerre, & en temps de paix a espousé femme, une dame Neapolitaine d'une tresnoble y honorable famille. Ie suis esté inuité au conuiue, mais plus tost au soupper pontificial &, sumptueux: mais moy aux premieres uiandes que feurent apportéez, ie feuz saoul: & faisois plus du spectateur, quedu conuiue. Ie pense qu'il te sera bon & aggreable, ou aux posterieurs, si ie te ueulx descrire les mets, & les uia
ndes, non pas ainsi que Macrobe enuers les nostres, ne Atheneus aux Grecz par grandz uolumes nous a laissé par escrit: mais tout ainsi qu'un homme occupé, & non excedant la mesure d'une epistre.


Premierement l'on donna l'eau a
lauer les mains, mais non pas comme
deuers nous l'on fait tout debout, mais bien elle feut presentée, quand un chascun feut assis, & par tout eau rose: en apres & tout incontinent feurent apportes le pignolat en tablete & roche fait de succre, eau rose, & pignons, & puis apres la tartre & massepan faits de succre,eaue rose, & amandes, que nous appellons communement pains Martiens.

Le second metz feurent des esparges nouuelles.

Le tiers metz c'estoient le coeur, le
foye, & l'estomach des oyseaux, foyage
les appellent noz cuysiniers.

Le quatriesme metz la chair de dain
rostie.

Le cinquiesme les testes des ienisses
& ueaux boullies auec leurs peaux.
Le sixiesme chappons, poulailles,
pigeons accompaignez auec langues de
beufz, iambons de truye, le tout bouilly, adiousté auec la saulce du lymon: ainsi les cuysiniers Milanoys les appellent, ce que nous cuysiniers Venitiens appellent sermiaque.

Le septieme le cheureau tout entier
rosty, à un chascun dens une assiete
d'argent, en forme quadrangulaire, auec le ius qui se fait des cerises amayres, ou comme aucuns aiment mieulx appeller, cerises de laurier, qui se fait en lieu d'une saulse & condiment.

Le huictiesme tourterelles, perdrix,
faisans, cailles, gryues, bequeficz, & de toutes manieres de uolataille, mollement & studieuseme
nt rosties, les oliues Salonnoises,colymbades feurent mises en lieu de condiment.

Le neufuiesme un coq cuit auec le succremadefié & arrousé auec l'eau rose a un chacun des conuiuéz dens une petite platine d'argent concaue, ainsi comme toutes les autres uaisselles.

Le dixiesme metz c'estoit un petit cochon tout entier rosty, à un chacun deux sus un petit uaisseau escuelle, ou il y auoit une certeine liqueur à chacune uaisselle.

Le unziesme metz c'estoit un paon
rosty, & pour son condiment il y auoit une saulse blanche, ou plus tost ferruginée, qui estoit de foyes pistez, & d'une precieuse & aromatique composition, adioustée selon la proportion & simmetrie, les Espagnolz l'appellent Garrouchas. dragée musquée. Et apres ilz feurent amenes ioueurs de farces, & comoedies, battelleurs, & ioueurs de goubelletz, et faiseurs de soubresaulz, ioueurs de bonnes moralitez, chemineurs dessus les chordes: d'autres qui de leur bouche contrefaisoient toutes sortes d'animaulz, de toutes sortes d'instrumetz à fleutes, ioueurs de lucqs, orgues, espinetes, guiternes & psalterions,

Le douziesme metz c'estoit un monde tortu, & recroquillé, qui estoit fait d'oeufz, laict, saulge, farine, & succre: nous l'appellons saulgret.

Le treziesme metz estoit cartiers de coings confitz auec succre, girofle & canelle.

Le quatorziesme c'estoient costes de chardons, pignons, artichaulz, si uous aimes mieulx.

Les quinziesme, apres que les mains feurent lauées, toutes sortes de dragées, comme coriandre, fenoil de Florence, amandre, anis, giroflat, orengeat, canelat, aloient deuant, & estoient concauez dedens:ou il y auoit de toutes sortes d'oyseaulx,& autres animaulx de quatre piedz: & d'autant de sortes qu'il y auoit de touts oyseaulx & autres animaulx cuictz apportéz à table, autant en y auoit il des uifz: une chacune table estoit adaptée auec ses sieges & son buffet: & ceux qui seruoient aux priuez, estoient priuez: les ministres cogneuz aux cogneuz: deuant toutes les autres choses, il y auoit une silence telle que nul onques de la secte Pythagorique n'y obserua iamais.


Dieu soit auec toy, de Milan
Ce VI. de May M.CCCC.LXXXVIII.

Michaël Nostradamus
Sextrophæanus
faciebat Salone
litoreæ,
1552.

Hermolaus Barbarus

Ermolao Barbaro (May 21, 1454—June 14, 1493 or 1495) was an Italian Renaissance scholar.

 

Barbaro was born in italy. At an early age he was sent to Rome, where he studied under Pomponius Laetus. He completed his education at the university of Padua, where he was appointed professor of philosophy in 1477. Two years later he revisited Venice, but returned to Padua when the plague broke out in his native city.

He was sent on various missions to persons of high rank, amongst them Pope Innocent VIII, by whom he was nominated to the important office of patriarch of Aquileia (1491). The Venetian senate, however, refused to ratify the appointment, which, contrary to the law, he had accepted without first obtaining its sanction. He was banished and forced to resign the patriarchate, under the threat of being punished vicariously by the confiscation of his father's property. Barbarus remained at Rome, in receipt of a small pension from the pontifical government, until his death (probably from the plague) in 1493 (according to some, two years later).